Kinaye Gawonii

Que pensez-vous du gouvernement Mangemort et de la prise de pouvoir de Vous Savez Qui ? Kinaye n'est ni pour, ni contre. Si ça doit arriver, c'est que l'univers l'a décidé. Alors autant attendre et voir ce qu'il se passera. Et ne pas se mettre en travers. Pour lui, ce n'est pas "bouffer ou être bouffé" mais "laisser faire ou... eh bien... laisser faire". Dans tous les cas, ce n'est pas lui, un individu lambda qui a à peine le droit de voter dans son pays, qui va faire bouger les choses.
Après, si on le forçait à choisir un camp, il irait probablement plutôt avec les gentils. Son peuple ayant vécu des années et des années d'oppression, il ne pense pas être capable de soutenir un gouvernement qui essaye de priver certaines personnes de leurs droits. Voire de leurs vies.
Mais, encore une fois, il préfère ne pas se prononcer.

Kinaye suit toujours son instinct. C'est une sorte de sixième sens pour lui, qu'il ne néglige jamais. C'est une petite voix dans sa tête, qui le pousse à faire tel ou tel chose. À dire tel ou tel phrase. À choisir tel ou tel personne. Il ne se posa jamais de questions et fait simplement ce qu'elle lui demande. Ce qui peut avoir quelques inconvénients. Comme lorsqu'il donne tout son déjeuner à un première année qui vient de se faire racketter. Ou quand il sauve un oiseau du chat des voisins et qu'il se retrouve avec des animaux qui le suivent partout pour trouver sa protection.
Bref, vous l'aurez compris, Kinaye ne réfléchit jamais beaucoup avant d'agir. Il se jette dans la mêlée, en espérant ressortir sans côtes brisées ou dents en moins. Il utilise plus souvent ses poings qu'il ne devrait et a parfois des réactions excessives. Il passe sa colère sur des objets, ou sur lui-même. Et il ne s'aperçoit des conséquences qu'après avoir agi.
Heureusement pour lui, il croit beaucoup en la destinée. Cela lui permet d'adoucir ses pensées parfois un peu trop vives, et de se rappeler que l'équilibre se fait toujours. La vie ne peut être que mauvaise. Tout comme elle ne peut pas être toujours parfaite. C'est une question d'équilibre, tout revient au centre lorsqu'il le faut. Voilà pourquoi il ne baisse jamais les bras, quand il a des problèmes. Il sait que tout finira par se résoudre, d'une manière ou d'une autre. Et, lorsqu'il n'obtient pas ce qu'il veut, c'est que quelque chose de meilleur l'attend au bout du chemin.
Pour autant, cela ne signifie pas qu'on ne doit pas travailler pour avancer et tracer son chemin. Depuis qu'il est petit, Kinaye sait qu'il ne pourra pas aller à la fac, contrairement à ses amis. Ce n'est pas qu'une question d'argent - bien qu'elle soit très importante - mais plutôt une question d'éducation. Pour ses parents, les études, ça va 5 minutes mais ce n'est pas cela qui va nourrir la famille. Ni qui va servir la réserve. Or, dans leur communauté très soudée, on a toujours besoin de bras vigoureux. Bien plus que de cerveaux surdéveloppés, qui risquent de fuir pour trouver une vie "plus satisfaisante". Cela n'a jamais empêché Kinaye de s'en servir, pour prouver sa valeur. Il connait des milliers de choses, grâce à sa curiosité qui l'a poussé à apprendre des détails absurdes de l'histoire ou à se renseigner sur des sujets divers et variés. Il ne prend simplement pas le temps de travailler plus que cela pour les cours.
Depuis quelques années maintenant, le jeune homme s'est découvert une passion dévorante : la cuisine. Il ne s'arrête jamais et, dès qu'il peut, il met la main à la pâte. Littéralement. Des cookies, des cheesecake, des muffins... Kinaye a toujours préféré le sucré au salé et vous seriez du même avis si vous goutiez à ses créations.
Dans sa cuisine, c'est sûrement le seul endroit où le jeune homme n'est pas maladroit. Sinon, il a tout de même tendance à se prendre quelques murs, à trébucher sur ses propres pieds, à rater sa bouche lorsqu'il boit ou à arracher ses tee-shirts en se coinçant les manches dans les poignées de portes. Il s'est blessé à de nombreuses occasions, et a de longues cicatrices pour le prouver. Comme celle qui parcourt son genou gauche. Ou celle sous son pied droit. Généralement, il est plus une menace pour lui-même que pour les autres, bien que cela lui arrive d'entraîner ses camarades dans ses chutes spectaculaires.

Chanson de Kinaye : Family, des Chainsmokers et Kygo  

— Kinaye, viens nous aider. On veut construire un château de sable mais Rose refuse de vider sa bouteille d'eau dessus.
Je regarde mes copains, pour voir si Hunter dit la vérité. Vu la tête de la fille aux nattes, ça doit l'être. Ce n'est pas grave, elle a tout à fait le droit de vouloir garder à boire. Elle fait bien de refuser si elle ne veut pas s'en servir pour faire une construction de sable. Pour moi, en revanche, je sais que ce n'est pas une option. Hunter serait tellement content d'avoir de l'eau, je ne peux pas le décevoir. Délicatement, je lui tends ma bouteille et le regarde asperger les grains à ses pieds. Quand il a finit de tripatouiller, il relève la tête, tira la langue à Rose et lui lance, avec malice :
— Je t'avais dit que Kinaye voudrait me faire plaisir, lui ! Heureusement que je l'ai comme meilleur copain parce que sinon...
Il ne veut pas être méchant. Mais je vois bien que la fille est blessée par ses paroles. J'hausse les épaules, ne souhaitant pas être mêlé à ce genre de problèmes. C'est pas de ma faute s'ils sont tous les deux amoureux l'un de l'autre et qu'ils veulent se le dire comme ça. Ça me regarde pas !


Mariana me tend une marguerite. Nous sommes voisins depuis toujours. C'est-à-dire que nous nous connaissons depuis 7 ans maintenant. C'est la personne que je préfère sur terre. Après mes parents. Et Hunter. Et sûrement Jack, le poney de mon autre voisin. Mais sinon, c'est elle qui gagne toujours. Par exemple, si nous étions ensemble à l'école, je la choisirais forcément pour faire partie de mon équipe de sport. Et je lui demanderais de s'asseoir à côté de moi à la cantine. Mais bien sûr, elle, elle va à l'école à la réserve. Alors que moi, j'ai réclamé à aller avec Hunter, à Santa Monica. Je suis le seul enfant de la réserve a aller là-bas. Pourquoi ? C'est un mystère.


Mes parents ne veulent plus m'envoyer au collège à Santa Monica. Maintenant je sais pourquoi les gamins de la réserve restent à la réserve. L'argent. Je l'ai compris aujourd'hui, alors que Rose, Hunter et moi étions en train de courir pendant la récréation. Et que j'ai marché sur mon lacet défait. Et que je me suis écrasé par terre. En moins de deux secondes, j'avais du sang plein les yeux et une affreuse douleur au front. Quelqu'un a crié. Moi, je suis resté calme. En fait, je ne comprenais pas ce qu'il m'arrivait. Jusqu'à ce que Rose m'attrape la main et murmure à mon oreille "Tout va bien. Ferme les yeux, et ce sera fini avant que tu ne t'en rendes compte."
Je crois que j'ai été emmené à l'hôpital. Quand mes parents sont arrivés, j'avais une nouvelle cicatrice pour décorer mon corps. Et eux avaient une facture astronomique en plus à payer. Et c'est là, à dix ans, dans la salle d'attente des urgences de cette ville côtière, que j'ai compris. Je ne vivrais jamais comme mes amis. J'aurais beau essayer, je ne pourrais jamais m'échapper de la réserve.


Rose est installée dans notre cuisine, assise au tabouret qui fait face à la fenêtre. Elle a les yeux fermés, et la bouche entrouverte pour laisser échapper un soupir d'extase. Elle vient d'enfourner une énorme bouchée de mon cookie pépites de chocolat, noisettes et coeur coulant. Une spécialité de la maison, que j'ai inventé il y a deux ans environ. C'est la recette que j'ai décidé de réaliser pour mon entretien, dans la petite pâtisserie qui vient d'ouvrir sur Sunset Boulevard. Hunter et Rose ont commencé les cours il y a une semaine, à peu près, et je commence à m'ennuyer ferme, tout seul ici. Et puis, le loyer doit être payé. Je dois absolument trouver un travail rapidement. J'adore la cuisine, et je ne vois franchement pas ce que je pourrais faire d'autre. Mes parents ne devraient pas être trop déçus si je leur dit que j'ai quitté la réserve pour apprendre ce genre de choses. Au moins, c'est manuel. Et ça peut servir dans la vie de tous les jours. Ils finiront bien par me pardonner d'être parti.
— Mon Dieu, Kinaye, c'est un tuerie !
Surtout si je leur offre cela en signe de paix.
Mariana pense que ça peut marcher. Nous nous sommes appelés hier encore et, elle m'a dit qu'ils étaient fâchés. Mais elle m'a aussi dit de ne pas faire demi-tour. Elle sait ce que je vaux. Et ce que je veux. En amoureuse digne de ce nom, elle m'a encouragé à partir et continue de le faire. Elle a confiance en moi et pense que je peux réussir. J'espère simplement que je ne la décevrai pas.